Le conflit du Haut-Karabakh traité par la Conférence de Minsk de l’OSCE
1. L’Assemblée parlementaire regrette que, plus de dix ans après le début des hostilités, le conflit du Haut-Karabakh ne soit toujours pas résolu. Des centaines de milliers de personnes sont encore déplacées et vivent dans des conditions misérables. Des parties importantes du territoire azerbaïdjanais demeurent occupées par les forces arméniennes et des forces séparatistes conservent le contrôle de la région du Haut-Karabakh.
2. L’Assemblée craint que les opérations militaires et les affrontements ethniques généralisés qui les ont précédées n’aient abouti à des expulsions ethniques massives et à la création de zones monoethniques, faisant resurgir le terrible concept de purification ethnique. L’Assemblée réaffirme que l’indépendance et la sécession d’un territoire qui fait partie d’un Etat ne peuvent être que l’aboutissement d’un processus légal et pacifique, fondé sur le soutien exprimé démocratiquement par les habitants du territoire en question; elles ne sauraient être la conséquence d’un conflit armé débouchant sur des expulsions ethniques et sur l’annexion de fait du territoire concerné par un autre Etat. L’Assemblée rappelle que l’occupation d’un territoire étranger par un Etat membre constitue une grave violation des obligations qui incombent à cet Etat en sa qualité de membre du Conseil de l’Europe, et réaffirme le droit des personnes déplacées de la zone du conflit de retourner dans leur foyer dans la sécurité et la dignité.
3. L’Assemblée rappelle les Résolutions 822 (1993), 853 (1993), 874 (1993) et 884 (1993) du Conseil de sécurité des Nations Unies; elle invite instamment les parties concernées à se conformer à ces résolutions, notamment en renonçant aux hostilités armées et en retirant leurs forces militaires des territoires occupés. Dans le même temps, l’Assemblée fait sienne l’exigence exprimée dans la Résolution 853 du Conseil de sécurité des Nations Unies; elle invite donc instamment tous les Etats membres à s’abstenir de toute fourniture d’armes et de munitions qui pourrait conduire à une intensification du conflit ou à la poursuite de l’occupation de territoires.
4. L’Assemblée rappelle que l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont, l’un et l’autre, pris l’engagement, lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe en janvier 2001, de n’utiliser que des moyens pacifiques pour régler le conflit, en s’abstenant de menacer de faire usage de la force contre le pays voisin. Dans le même temps, l’Arménie s’est engagée à user de son influence considérable sur le Haut-Karabakh pour promouvoir une solution au conflit. L’Assemblée invite instamment les deux gouvernements à respecter ces engagements et à s’abstenir de faire usage de la force armée l’un contre l’autre ou de développer les actions militaires.
5. L’Assemblée rappelle que le Conseil des ministres de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) était convenu à Helsinki, en mars 1992, de tenir une conférence à Minsk afin de fournir un cadre aux négociations en vue d’un règlement pacifique du conflit. L’Arménie, l’Azerbaïdjan, le Bélarus, l’ex-République fédérative tchèque et slovaque, la France, l’Allemagne, l’Italie, la Fédération de Russie, la Suède, la Turquie et les Etats-Unis avaient accepté, à l’époque, de participer à cette conférence. L’Assemblée invite ces Etats à redoubler d’efforts pour obtenir un règlement pacifique du conflit et elle invite leurs délégations nationales à l’Assemblée à lui rendre compte chaque année de l’action de leur gouvernement sur ce terrain. A cette fin, l’Assemblée demande à son Bureau de créer une commission ad hoc où siégeraient, entre autres, les chefs de ces délégations nationales.
6. L’Assemblée rend hommage aux efforts inlassables des coprésidents du Groupe de Minsk et du représentant personnel du président en exercice de l’OSCE; elle leur sait gré, en particulier, d’avoir obtenu un cessez-le-feu en mai 1994 et d’avoir constamment veillé au respect de celui-ci depuis lors. L’Assemblée invite les coprésidents du Groupe de Minsk de l’OSCE à prendre des mesures immédiates pour mener des négociations rapides visant à la conclusion d’un accord politique sur la cessation du conflit armé. La mise en œuvre de cet accord éliminera les conséquences majeures de ce conflit pour toutes les parties et permettra la tenue de la Conférence de Minsk.L’Assemblée invite l’Arménie et l’Azerbaïdjan à mettre à profit le processus de Minsk de l’OSCE et à se soumettre mutuellement, par l’intermédiaire du Groupe de Minsk, des propositions constructives pour le règlement pacifique du conflit, conformément aux normes appropriées et aux principes du droit international.
7. L’Assemblée rappelle que l’Arménie et l’Azerbaïdjan sont signataires de la Charte des Nations Unies et qu’ils sont ipso facto, conformément à l’article 93, paragraphe 1, de la charte, parties au statut de la Cour internationale de justice. Par conséquent, l’Assemblée propose que, si les négociations sous les auspices des coprésidents du Groupe de Minsk devaient ne pas aboutir, l’Arménie et l’Azerbaïdjan envisagent de saisir la Cour internationale de justice, conformément à l’article 36, paragraphe 1, des statuts de cette cour.
8. L’Assemblée invite l’Arménie et l’Azerbaïdjan à se réconcilier politiquement en accélérant une coopération bilatérale interparlementaire, au sein de l’Assemblée comme au sein d’autres instances, telles les réunions des présidents des parlements des quatre pays du Caucase. Elle recommande que les deux délégations se réunissent lors de chaque partie de session de l’Assemblée pour réexaminer les progrès d’une telle réconciliation.
9. L’Assemblée invite le Gouvernement d’Azerbaïdjan à établir des contacts, sans conditions préalables, avec les représentants des forces politiques des deux communautés de la région du Haut-Karabakh, concernant le statut futur de la région. Elle est disposée à faciliter la tenue de tels contacts à Strasbourg, rappelant qu’elle l’a déjà fait sous forme d’audition en d’autres occasions, avec une participation arménienne.
10. Rappelant sa Recommandation 1570 (2002) sur la situation des réfugiés et des personnes déplacées en Arménie, en Azerbaïdjan et en Géorgie, l’Assemblée invite tous les Etats membres et les Etats observateurs à fournir une aide et une assistance humanitaires aux centaines de milliers de personnes qui ont été déplacées à la suite des hostilités armées et de l’expulsion des Arméniens d’Azerbaïdjan et des Azerbaïdjanais d’Arménie.
11. L’Assemblée condamne toute expression de haine véhiculée par les médias arméniens et azerbaïdjanais. Elle exhorte l’Arménie et l’Azerbaïdjan à prendre le chemin de la réconciliation et à restaurer la confiance et l’entente mutuelle entre les deux peuples par le biais des écoles, des universités et des médias. A défaut d’une telle réconciliation, la haine et la méfiance empêcheront la stabilité dans la région et pourraient entraîner de nouvelles violences. Le processus de réconciliation est le préalable à tout règlement durable et doit en être le socle.
12. L’Assemblée invite le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à élaborer un plan d’action et d’assistance à l’Arménie et à l’Azerbaïdjan, centré sur des processus de réconciliation; elle lui demande également de prendre en compte la présente résolution pour décider des actions à entreprendre au sujet de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan.
13. L’Assemblée invite le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe à aider les élus locaux d’Arménie et d’Azerbaïdjan à établir des contacts réciproques et à instituer une coopération interrégionale.
14. L’Assemblée décide d’analyser les mécanismes de règlement des conflits existants au sein du Conseil de l’Europe, et notamment la Convention européenne pour le règlement pacifique des différends, afin de mettre à la disposition des Etats membres des mécanismes mieux adaptés au règlement pacifique des conflits bilatéraux, ainsi que des différends internes opposant des collectivités ou des autorités locales ou régionales, qui peuvent représenter une menace pour les droits de l’homme, la stabilité et la paix.
15. L’Assemblée décide de continuer de suivre régulièrement l’évolution de ce conflit vers un règlement pacifique et décide de revenir sur ce sujet lors de sa première partie de session de 2006.